Analyse de l'arrêt TF 4A_676/2024
11 septembre 2025
L’inadmissibilité du porte-fort comme garantie en bail immobilier à Genève
I. Objet de l’arrêt
Une procédure de mainlevée donne l’occasion au Tribunal fédéral de se pencher sur la validité d’un porte-fort comme garantie dans un bail immobilier à Genève, sous l’angle de l’examen sommaire des moyens libératoires du poursuivi. Il juge sous cet angle conforme au droit fédéral la conclusion de la Cour cantonale considérant qu’une telle sûreté est contraire à l’art. 1 de la loi genevoise du 18 avril 1975 protégeant les garanties fournies par les locataires.
II. Résumé de l’arrêt
A. Les faits
En novembre 2022, A. SA et Z.C. SA (ci-après : la locataire), agissant « avec le concours aux fins de garantie de Z.D. SA et B. (les garants) », ont conclu un contrat de bail à loyer portant notamment sur des locaux à la route (...).
Le loyer mensuel était fixé à 10 % du chiffre d’affaires réalisé par la locataire, avec un minimum de CHF 22’500.- du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2027, puis un minimum de CHF 27’500.- payable par trimestre d’avance.
La locataire reconnaissait que la valeur des aménagements dont elle disposait s’élevait à
CHF 550’000.-, dont elle avait déjà versé CHF 200’000.-. Elle s’engageait à payer un solde de CHF 350’000.- au plus tard le 30 novembre 2022 (art. 7 ch. 2 du contrat de bail).
L’art. 16 du contrat de bail précisait que B. et Z.D. SA contresignaient le bail « uniquement en qualité de garants ».
Le 4 janvier 2024, A. SA a fait notifier à B. un commandement de payer portant sur la somme de CHF 70’000.- avec intérêts avec la mention « Obligation à titre de garant, selon art. 7 ch. 2 du contrat de bail à ferme du 30 novembre 2022 », ainsi que sur les montants, avec intérêts, de CHF 22’500.- à titre de loyer pour le mois d’octobre 2023, CHF 22’500.- pour celui de novembre 2023 et CHF 22’500.- pour décembre 2023, avec chaque fois la précision « Garant selon contrat de bail à ferme du 30 novembre 2022 ».
Le poursuivi a formé opposition au commandement de payer.
La poursuivante a requis du Tribunal de première instance du canton de Genève le prononcé de la mainlevée provisoire de cette opposition. Elle a qualifié la garantie donnée par le poursuivi de porte-fort au sens de l’art. 111 CO.
Lors de l’audience devant le tribunal, le poursuivi a conclu au rejet de la requête, au motif que son engagement devait être qualifié de cautionnement, conformément à la législation applicable, et que celui-ci était nul, faute d’avoir été passé en la forme authentique et avec le consentement écrit de son épouse. La poursuivante a déclaré que le contrat avait été longuement négocié et qu’elle avait elle-même exigé que le poursuivi se porte garant. A l’issue de l’audience, la cause a été gardée à juger.
Par jugement du 18 juin 2024, le tribunal, statuant par voie de procédure sommaire, a rejeté la requête de mainlevée provisoire.
La poursuivante a formé un recours contre ce jugement auprès de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Par arrêt du 13 novembre 2024, la cour cantonale a rejeté le recours.
B. Le droit (consid. 5 et 8)
5.1. L’art. 257e CO prévoit que si le locataire d’habitations ou de locaux commerciaux fournit des sûretés en espèces ou sous forme de papiers-valeurs, le bailleur doit les déposer auprès d’une banque, sur un compte d’épargne ou de dépôt au nom du locataire (al. 1). Lorsqu’il s’agit de baux d’habitations, le bailleur ne peut exiger des sûretés dont le montant dépasse trois mois de loyer (al. 2). L’alinéa 3 traite de la restitution des sûretés. Enfin, selon l’alinéa 4, les cantons peuvent édicter des dispositions complémentaires.
D’après l’art. 1 de la loi genevoise du 18 avril 1975 protégeant les garanties fournies par les locataires (LGFL ; RS/GE I 4 10), toute garantie en espèces ou en valeurs fournie en faveur d’un bailleur par un locataire ou par une tierce personne au profit d’un locataire doit être constituée sous la forme d’un dépôt bloqué auprès de la caisse de consignation de l’Etat ou dans un établissement bancaire reconnu comme office de consignation au sens de l’art. 633 al. 3 CO (al. 1). Le recours au cautionnement simple est, toutefois, autorisé pour les baux à usage d’habitation, à la demande du locataire ; ce dernier peut en tout temps se mettre au bénéfice de l’alinéa 1 (al. 2). Le recours au cautionnement simple ou solidaire est autorisé pour les baux à usage exclusivement commercial (al. 3).
5.2. La cour cantonale, se référant à un article de doctrine (Bohnet/Jeannin, Codébiteurs solidaires et tiers garants en droit du bail, 20e séminaire sur le droit du bail, 2018, N 34), a retenu que l’art. 257e al. 4 CO permettait au législateur cantonal d’exclure certaines formes de garanties ou en fixer les modalités. Elle a ajouté que d’après la jurisprudence genevoise, l’art. 1 LGFL excluait toutes formes de garanties données par le locataire et des tiers en faveur d’un bailleur autres que les deux formes de garanties mentionnées, à savoir, d’une part, celles en espèces ou en valeurs fournies par le locataire lui-même ou par une tierce personne, et d’autre part, le recours au cautionnement simple, car seul ce dernier permettait au locataire d’opposer ses droits découlant du contrat de bail (CJ/GE, 07.09.1998 ACJC/902/1998, consid. 7). Ainsi, lorsque la recourante soutenait que la garantie donnée par l’intimé consistait en un porte-fort, il devait être considéré qu’un porte-fort ne pouvait pas valablement garantir les obligations d’un locataire de locaux commerciaux au regard de la législation et de la jurisprudence genevoises. Dans le porte-fort, le promettant (l’intimé) ne pouvait pas se prévaloir des exceptions que le tiers (la locataire) pourrait opposer au bénéficiaire (la recourante), sauf circonstances particulières non réalisées en l’espèce ; seul le cautionnement permettait à la caution de se prévaloir de telles exceptions, ce qui protégeait les locataires et justifiait que cette seule forme de garantie soit admise en la matière.
Selon la cour cantonale, cette jurisprudence genevoise n’avait pas fait l’objet d’une contestation devant le Tribunal fédéral. Toutefois, dans l’ATF 102 Ia 372, consid. 3, il avait considéré que l’art. 6 al. 2 AMSL (arrêté fédéral du 30 juin 1972 instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif, abrogé le 1er juillet 1990), dont la teneur était quasiment identique à celle de l’art. 257e al. 4 CO, permettait aux cantons d’édicter des dispositions complémentaires non seulement en ce qui concernait les sûretés fournies en espèces ou sous forme de papiers-valeurs, mais également pour les autres formes de sûretés. La jurisprudence genevoise susmentionnée paraissait ainsi difficilement contestable. Dès lors, la compétence du législateur genevois, en vertu de l’art. 257e al. 4 CO, de limiter les formes de garanties susceptibles d’être fournies en matière de baux d’habitation et de locaux commerciaux n’avait été remise en cause ni par le Tribunal fédéral, ni par la doctrine. De plus, il n’appartenait pas au juge de la mainlevée, dont le pouvoir d’examen était limité, de revoir le bien-fondé de la législation cantonale en vigueur et de la jurisprudence rendue de longue date sur celle-ci par le juge du fond.
5.3. La recourante soutient que l’appréciation de la cour cantonale excède le pouvoir d’examen du juge de la mainlevée. L’art. 257e al. 4 CO autorise seulement le législateur cantonal à réglementer les garanties « avec des dispositions complémentaires », mais non à en écarter certaines. Elle affirme que dans l’ATF 102 Ia 372, le Tribunal fédéral ne s’est notamment pas exprimé sur la protection d’un tiers, qui fournirait sa garantie personnelle pour permettre au locataire d’obtenir le bail souhaité.
Par ailleurs, la recourante allègue que le texte de l’art. 1 LGFL est limpide et que l’exclusion de la garantie de porte-fort ne saurait être déduite de son texte. Elle ajoute que l’interprétation de cette disposition qui conduirait à priver le bailleur du droit de solliciter une garantie personnelle prévue par le droit fédéral, tel un porte-fort, constituerait une atteinte au principe de la primauté du droit fédéral tel que garanti à l’art. 49 Cst. ; en effet, une telle situation engendrerait une contradiction entre l’art. 111 CO, norme de droit fédéral, et une norme cantonale.
Enfin, la recourante affirme que le but d’intérêt public à la protection des locataires, à l’origine de la loi genevoise, ne saurait être invoqué à son profit par l’intimé. Quant à la locataire, elle n’avait pas d’intérêt économique à se prévaloir de la loi genevoise, puisque la garantie personnelle de l’intimé lui avait permis d’obtenir la mise à disposition des locaux et d’être soulagée d’une dette par l’intimé.
5.4. En l’espèce, la cour cantonale s’est fondée sur la jurisprudence genevoise, l’ATF 102 Ia 372, ainsi qu’un article de doctrine pour considérer que l’art. 257e al. 4 CO permettait aux cantons d’exclure certains types de garanties, ce qui était le cas de l’art. 1 LGFL.
Dans le cadre de l’examen sommaire du bien-fondé juridique des moyens libératoires du poursuivi – lequel doit rendre sa libération vraisemblable – auquel est tenu le juge de la mainlevée (cf. ATF 145 III 213, consid. 6.1.3 ; TF, 01.05.2019, 5A_89/2019, consid. 5.2.2), les considérations de la cour cantonale n’apparaissent pas contraires au droit fédéral. En effet, dans l’ATF 102 Ia 372, les recourantes demandaient l’annulation de l’art. 1 al. 2 et 3 LGFL en tant qu’il interdisait le cautionnement solidaire en matière de baux d’habitation ; elles faisaient notamment valoir que l’art. 6 al. 2 AMSL (abrogé depuis lors) ne visait que les sûretés en espèces. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours, en considérant que cette dernière disposition, dont la teneur était effectivement proche de celle de l’art. 257e al. 4 CO, visait également les sûretés autres que celles fournies ou versées en espèces. La doctrine présentée par la cour cantonale (Bohnet/Jeannin, op. cit., n. 34) admet que les cantons peuvent exclure certaines formes de garantie, en se référant également à d’autres contributions en ce sens (Sylvain Marchand, in Droit du bail à loyer et à ferme, Commentaire pratique, 2e éd. 2017, n. 5 ad art. 257e CO ; Daniel Stoll, Sicherheitsleistungen der Mieterschaft vor dem Hintergrund kantonalrechtlicher Bestimmungen – eine Übersicht zu Art. 257e Abs. 4 OR, Mietrechtspraxis [mp] 2007, p. 69). Si l’auteur cité par la recourante émet des doutes à ce propos, il relève que la doctrine a reconnu la possibilité d’une exclusion et ajoute que plusieurs cantons ont légiféré en ce sens (Bénédict Foëx, 12e séminaire sur le droit du bail, 2002, p. 8). En effet, l’art. 1 de la loi vaudoise du 15 septembre 1971 sur les garanties en matière de baux à loyer (LGBL ; RS/VD 221.307) et l’art. 191 de la loi valaisanne du 24 mars 1998 d’application du code civil suisse (LACC ; RS/VS 211.1) prévoient expressément l’exclusion de certains types de garantie. Il n’appartient pas au juge de la mainlevée d’examiner cette question de façon plus approfondie.
Il ne lui incombe pas non plus de remettre en cause la jurisprudence genevoise quant à l’interprétation de l’art. 1 LGFL en ce sens que cette disposition énumère de manière exhaustive les formes de garantie admissibles, et exclut ainsi le porte-fort. D’ailleurs, on ne saurait considérer que cette interprétation d’une norme cantonale, et l’application qui en a été faite, est arbitraire, au vu notamment du texte de cette disposition. En outre, contrairement à ce que prétend la recourante, elle ne présente pas non plus de contradiction avec l’art. 111 CO puisque, selon l’examen sommaire de la cour cantonale, non critiquable ici, la garantie de porte-fort pouvait être exclue par les cantons en application de l’art. 257e al. 4 CO. Au surplus, la recourante se contente d’affirmations au sujet de l’intérêt de la locataire et ne discute pas réellement la motivation que la cour cantonale a exposée s’agissant de la protection des locataires pour justifier l’exclusion du porte-fort. L’invocation de la loi genevoise par l’intimé ne saurait modifier ce qui précède.
En définitive, l’autorité cantonale pouvait considérer que l’intimé avait rendu vraisemblable sa libération, plus particulièrement le fait qu’un porte-fort ne pouvait pas valablement garantir les obligations d’un locataire de locaux commerciaux dans le canton de Genève, et que le contrat litigieux ne pouvait ainsi valoir titre de mainlevée. Au vu de la nature de la procédure de mainlevée (cf. supra consid. 4), la décision du juge de la mainlevée ne prive pas la recourante de soumettre à nouveau les questions litigieuses au juge ordinaire (art. 79 LP).
8. Enfin, la recourante reproche à la cour cantonale d’avoir écarté son moyen subsidiaire selon lequel l’intimé avait commis un abus de droit en invoquant la nullité de la clause de garantie. Elle se plaint d’une violation des art. 5 al. 3 Cst. et 2 al. 2 CC.
8.1. L’abus manifeste d’un droit (art. 2 al. 2 CC) n’est pas protégé par la loi. Ce principe permet de corriger les effets de la loi dans certains cas où l’exercice d’un droit allégué créerait une injustice manifeste. Le juge apprécie la question au regard des circonstances concrètes, qui sont déterminantes. L’emploi dans le texte légal du qualificatif « manifeste » démontre que l’abus de droit doit être admis restrictivement. Les cas typiques en sont l’absence d’intérêt à l’exercice d’un droit, l’utilisation d’une institution juridique de façon contraire à son but, la disproportion manifeste des intérêts en présence, l’exercice d’un droit sans ménagement ou l’attitude contradictoire (ATF 143 III 279, consid. 3.1 ; 140 III 583, consid. 3.2.4 et les références citées).
L’abus de droit peut aussi être invoqué dans la procédure de mainlevée provisoire ; ce moyen demeure toutefois exceptionnel dès lors que l’instruction des questions factuelles correspondantes est généralement incompatible avec la nature documentaire de la procédure de mainlevée (arrêts 4A_443/2024 précité, consid. 5.2.3 ; 5A_21/2022 du 5 avril 2022, consid. 4.2.2.3).
8.2. La cour cantonale a relevé que selon la recourante, l’intimé aurait certainement su, ou n’aurait pu raisonnablement ignorer, lors de la conclusion du bail, que son engagement en qualité de garant serait éventuellement invalide à la forme et qu’il aurait signé le bail avec l’intention de se prévaloir au besoin de ce motif pour se soustraire à ses obligations. D’après la cour cantonale, les allégations de la recourante selon lesquelles l’intimé serait rompu aux affaires et posséderait des compétences étendues dans les domaines de l’immobilier, des baux et des garanties, en particulier à Genève, n’étaient pas vérifiées par les pièces admises à la procédure et n’étaient pas non plus notoires. Le fait qu’à teneur de ces pièces, l’intimé était administrateur de deux sociétés, dont l’une active dans la restauration et l’autre dans la gestion de participations, ne suffisait notamment pas à démontrer la réalité des intentions que lui prêtait la recourante en relation avec la conclusion du bail litigieux, ni la mauvaise foi de celui-ci. Il n’était pas non plus établi que ce soit l’intimé qui ait proposé de s’engager en qualité de garant aux côtés de la locataire de la manière dont il l’avait fait, ni que la rédaction du contrat de bail sur ce point doive lui être imputée. Devant le tribunal, le représentant de la recourante avait au contraire exposé que cette dernière avait elle-même exigé que l’intimé se porte garant. Sachant que selon ce même représentant, le contrat avait été longuement négocié, il incombait à la recourante de s’assurer que l’engagement pris par l’intimé pour satisfaire ses propres exigences était valable ; elle avait disposé du temps et des moyens nécessaires pour ce faire.
Selon la cour cantonale, il n’y avait ainsi pas lieu de retenir que l’intimé reviendrait abusivement sur son engagement de garant, celui-ci ayant pu de bonne foi s’en remettre à l’appréciation de la recourante quant à la validité de la garantie qu’il lui était demandé de fournir.
8.3. La recourante soutient que le comportement de l’intimé, en invoquant de façon inattendue la nullité de sa garantie lors de l’audience devant le tribunal, laissait présumer qu’il avait introduit sa garantie dans le contrat en étant assuré qu’il pourrait en invoquer sa nullité en temps opportun. Or, la cour cantonale a constaté qu’il n’était pas établi que la rédaction du contrat de bail sur ce point devait lui être imputée. La recourante n’allègue pas une constatation manifestement inexacte des faits à cet égard, mais se contente de relever que ce point est sans pertinence dès lors que la garantie avait été intégrée au contrat avec l’accord de l’intimé, lequel n’ignorait pas ce que sa garantie impliquait sur le plan financier. Toutefois, et même s’il devait être retenu que l’intimé est (...) actif dans le marché immobilier genevois, il n’y aurait pas matière à admettre un abus de droit, étant précisé que, selon les constatations cantonales, la recourante est elle-même active dans l’immobilier à Genève et a disposé du temps nécessaire pour examiner le contrat.
III. Analyse
Le porte-fort (art. 111 CO) est un contrat par lequel le garant promet au garanti le fait d’un tiers et s’engage à l’indemniser pour le cas où celui-ci n’exécuterait pas la prestation visée1. L’obligation du garant ne dépend pas de savoir si le tiers a commis une faute ; il suffit que « le fait du tiers » ne soit pas intervenu2. Le porte-fort est subsidiaire à l’exécution du « fait du tiers » garanti : le garanti ne peut exiger la prestation du garant que lorsqu’il est clair que le tiers ne peut exercer la sienne, ou, s’il ne peut l’exercer que partiellement, dans quelle mesure3. Le garant s’engage souvent sans exiger de contre-prestation. Il procède alors fréquemment par « déclaration de garantie »4. Autant dire que ce type de garantie engage fortement la garante. Constituent notamment des porte-fort au sens de l’art. 111 CO la plupart des « garanties bancaires »5.
Dans le Canton de Genève, le porte-fort est exclu pour garantir les obligations du locataire dans des baux d’habitation et de locaux commerciaux : l’art. 1 al. 1 LGFL nomme en effet comme formes de sûreté la garantie sous forme de dépôt d’argent ou de valeurs mobilières ou le cautionnement. La jurisprudence genevoise a d’ores et déjà eu l’occasion de retenir que toute autre forme de garantie est exclue, étant donné que seul le cautionnement (simple) permet au locataire d’opposer ses droits découlant du contrat de bail6. Cette jurisprudence n’a pas été remise en cause devant le Tribunal fédéral. Comme ce dernier considérait que l’art. 6 al. 2 AMSL, dont la teneur est quasi identique à l’art. 257e al. 4 CO, permettait aux cantons d’édicter des dispositions complémentaires non seulement en ce qui concerne les sûretés fournies en espèces ou sous forme de papiers-valeurs, mais également pour les autres formes de sûretés7, il n’y a, a priori, pas de raison de remettre en cause cette approche8. L’arrêt 4A_676/2024, destiné à la publication, va dans cette direction. Le but de la législation genevoise est d’éviter les abus potentiels par le recours à d’autres formes de sûretés, ce qui correspond au but assigné à l’art. 257e al. 4 CO. Alors même que le Tribunal fédéral devait se limiter en l’espèce à vérifier l’existence d’un moyen libératoire du défendeur à la demande de mainlevée provisoire, on peut partir de l’idée qu’il parviendrait au même résultat dans une procédure au fond.
Notes
- Bohnet/Jeannin, Codébiteurs solidaires et tiers garants en droit du bail, 20e Séminaire sur le droit du bail, Bâle/Neuchâtel 2018, N 10 ; Carron/Wessner, Droit des obligations – Partie générale, Vol. II, Berne 2024, N 3638 ; Tercier/Carron, Les contrats spéciaux, 6e éd. Zurich 2025, N 6603 ; BSK OR I-Pestalozzi, art. 111 CO N 1. ↩
- Bohnet/Jeannin, op. cit, N 10 ; Alfred Koller, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 5e éd., Berne 2023 N 72.02. ↩
- ATF 101 II 323, consid. 1c in fine : « Im übrigen ist selbst die Leistungspflicht des Garanten in dem Sinne subsidiär, als er erst in Anspruch genommen werden darf, wenn feststeht, ob und in welchem Umfang die Leistung des Dritten entfällt » ; Bohnet/Jeannin, op. cit, N 13. ↩
- Bohnet/Jeannin, op. cit, N 16. ↩
- Tercier/Carron, op. cit, N 6635 et 6644. ↩
- Chambre d’appel en matière de baux et loyers, arrêts du 27.05.1991, ACJ n° 157, et du 07.09.1998, ACJ n° 908. ↩
- ATF 102 Ia 372, consid. 3. ↩
- Bohnet/Jeannin op. cit, N 40. ↩