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Newsletter février 2025
Editée par Bohnet F., Carron B., Percassi M.-L.
Ubi societas, ibi ius
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TF 4A_481/2024 du 5 novembre 2024
Résiliation; résiliation contraire à la bonne foi; travaux de transformation ou d’assainissement; congé en vue de tirer le meilleur profit de la vente du bien; congé-vente; art. 271 al. 1, 271a al. 1 let. c CO
La résiliation ordinaire d’un contrat de bail ne nécessite aucun motif particulier (art. 266a al. 1 CO). Un congé est toutefois annulable (art. 271 al. 1 CO) lorsqu’il est contraire à la bonne foi – c’est-à-dire lorsqu’il ne répond à aucun intérêt objectif, sérieux et digne de protection et qu’il apparaît ainsi purement chicanier ou consacrant une disproportion crasse entre les intérêts des parties (consid. 4).
Une résiliation en vue de travaux de transformation ou d’assainissement qui restreignent considérablement la poursuite de l’utilisation de l’objet loué n’est pas contraire au principe de la bonne foi. En revanche, si les travaux prévus ne sont pas ou peu entravés ou retardés par la présence du locataire dans l’objet loué, le bailleur n’a pas de raison digne de protection de résilier malgré tout le bail. Un tel congé est également abusif lorsque le bailleur ne dispose pas, au moment de la résiliation, d’un projet suffisamment mûr et élaboré pour permettre au locataire d’évaluer si son maintien dans les lieux rendrait plus difficile l’exécution des travaux envisagés ou si une évacuation de l’objet loué est nécessaire (consid. 5.1).
Selon la jurisprudence fédérale, une résiliation donnée par le bailleur pour des motifs purement économiques n’est pas systématiquement condamnable. Cela concerne deux cas : la résiliation pour optimiser le rendement du bien (« Ertragsoptimierungskündigung ») et la résiliation donnée dans le but de tirer un meilleur profit de la vente du bien (« Leerverkaufskündigung ») (consid. 6.2.1). Ce deuxième cas (« Leerverkaufskündigung ») se distingue du congé-vente de l’art. 271a al. 1 let. c CO, relatif à la situation où le bailleur propose uniquement au locataire du logement d’acheter le bien loué et qui est abusif s’il existe un lien de causalité adéquat entre la résiliation et la volonté de vendre au locataire. Ce lien fait défaut lorsque le motif du congé n’est pas uniquement d’inciter le locataire à acheter, mais que le bailleur est disposé à vendre à n’importe qui (et ce même s’il propose le bien, au même prix, en priorité au locataire)
(consid. 6.2.3).
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Commentaire de l'arrêt TF 4A_481/2024
Marie-Laure Percassi
Docteure en droit, collaboratrice scientifique à l'Université de Neuchâtel et avocate
TF 4A_114/2023 du 20 décembre 2024
Partie générale CO; défauts; procédure; droit à la preuve; expertise; contrat illicite; défaut de la chose louée; réduction de loyer; art. 29 al. 2 Cst.; 8 CC; 152, 168 al. 1 let. d et 183 ss CPC; 20, 258 ss CO
Le droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst., 8 CC et 152 CPC) confère au justiciable le droit de faire administrer les moyens de preuve adéquats qu’il propose régulièrement et en temps utile à l’appui de faits pertinents pour le sort du litige. Ce droit n’est pas mis en cause lorsque le juge, par une appréciation anticipée, arrive à la conclusion que la mesure requise n’apporterait pas la preuve attendue, ou ne modifierait pas la conviction acquise sur la base des preuves déjà recueillies. Un droit à la preuve par expertise (art. 168 al. 1 let. d et art. 183 ss CPC) peut résulter expressément du droit fédéral (par exemple l’art. 450e al. 3 CC), mais il peut aussi exister lorsque l’expertise apparaît comme le seul moyen de preuve adéquat, en particulier lorsque le juge n’est pas à même de résoudre, sur la base de ses propres connaissances, la question qui lui est soumise (consid. 4.1).
Un contrat est illicite au sens de l’art. 20 al. 1 CO lorsque son objet, sa conclusion avec le contenu convenu ou le but qu’il poursuit indirectement est contraire au droit objectif, qu’il s’agisse de normes de droit privé ou de droit public, fédéral ou cantonal. Pour qu’il y ait nullité de l’accord, cette conséquence doit être expressément prévue par la loi concernée ou découler du sens et du but de la norme transgressée (consid. 6.1). En matière de bail à loyer, l’usage convenu des locaux loués doit respecter les règles de droit public fédérales et cantonales quant à leur destination (consid. 6.2).
Il y a défaut de la chose louée (art. 258 ss CO) lorsque l’état réel de la chose diverge de l’état convenu, c’est-à-dire lorsque la chose ne présente pas une qualité que le bailleur avait promise ou lorsqu’elle ne présente pas une qualité sur laquelle le locataire pouvait légitimement compter en se référant à l’état approprié à l’usage convenu. Le défaut peut être de moyenne importance ou grave, ce qui est le cas lorsqu’une activité commerciale ne peut pas être exercée dans les locaux loués ou de manière très restreinte (consid. 7.1).
La réduction de loyer à laquelle peut prétendre le locataire est proportionnelle au défaut. En principe, il convient de procéder selon la méthode dite relative ou proportionnelle : la valeur objective de la chose avec défaut est rapportée à sa valeur objective sans défaut, le loyer étant ensuite réduit dans la même proportion. Cependant, le calcul proportionnel n’est pas toujours aisé. Il est alors admis qu’une appréciation en équité, par référence à l’expérience générale de la vie, au bon sens et à la casuistique, n’est pas contraire au droit fédéral (consid. 7.1).
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TF 4A_263/2024 du 10 décembre 2024
Procédure; qualité pour recourir; partie décédée; substitution de partie; aliénation du bien loué; droit à un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial; organisation judiciaire cantonale; art. 76 LTF; 11, 560 CC; 17 al. 3 PCF; 261 CO; 30 al. 1 Cst.; 6 par. 1 CEDH; 3 CPC
La qualité pour recourir (art. 76 LTF) présuppose la capacité d’être partie. Une personne décédée n’a pas la capacité d’être partie, qui est inséparable de la jouissance des droits civils au sens de l’art. 11 CC. Les droits et obligations à faire valoir en justice passent par succession universelle aux héritiers (art. 560 CC) (consid. 1.1.1).
Selon l’art. 17 al. 3 PCF, le changement des personnes n’entraîne pas substitution de parties lorsqu’il s’opère par succession universelle ou en vertu de dispositions légales spéciales. L’art. 261 al. 1 CO, qui prévoit que le bail passe à l’acquéreur avec la propriété de la chose si, après la conclusion du contrat, le bailleur aliène la chose louée, compte parmi les dispositions légales spéciales auxquelles l’art. 17 al. 3 PCF fait référence. Ainsi, l’acquéreur se substitue de plein droit au précédent bailleur dans les procès en cours pour les droits et obligations résultant du contrat après le moment du transfert (consid. 1.2.1).
Selon l’art. 30 al. 1 Cst., et l’art. 6 par. 1 CEDH, dont la portée est identique, toute personne dont la cause doit être jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. Cette réglementation vise à éviter que des tribunaux ne soient constitués spécialement pour le jugement d’une affaire et à empêcher que les juges choisis pour statuer dans une affaire déterminée ne le soient de façon à influencer le jugement. La composition et la formation des tribunaux civils appelés à statuer relèvent de l’organisation judiciaire cantonale (art. 3 CPC). Le tribunal est en principe valablement constitué lorsqu’il siège dans une composition qui correspond à ce que le droit cantonal prévoit. Le droit des parties à une composition régulière du tribunal exige néanmoins, en vue d’empêcher toute manipulation et afin de garantir l’indépendance nécessaire, une organisation judiciaire et une procédure déterminées par un texte légal (consid. 4.1).
En l’espèce, il est conforme à l’art. 30 al. 1 Cst. et non arbitraire d’interpréter l’art. 89 al. 2 LOJ/GE – qui prévoit que le Tribunal des baux et loyers exerce en outre les compétences que le CPC attribue au tribunal de l’exécution, pour les jugements ordonnant l’évacuation d’un locataire rendus par le Tribunal des baux et loyers et par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice – comme englobant également les requêtes d’exécution concernant les décisions rendues par le Tribunal des baux et loyers lui-même ou les transactions judiciaires passées devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers (consid. 4.2).
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TF 4A_489/2024 du 25 novembre 2024
Procédure; conditions de recevabilité; intérêt digne de protection; examen d’office; procédure de protection dans les cas clairs; objections; art. 76 al. 1 let. b LTF; 60, 257 CPC
Selon l’art. 76 al. 1 let. b LTF, la qualité pour recourir au Tribunal fédéral suppose d’avoir un intérêt digne de protection à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée. Cela suppose qu’au moment de la décision du Tribunal fédéral, la partie ait toujours un intérêt actuel et pratique à l’admission du recours, lui évitant de subir un préjudice économique, idéal ou matériel (consid. 1.2).
L’absence d’une condition de recevabilité doit être examinée d’office à tout stade de la procédure (cf. art. 60 CPC). Selon le Tribunal fédéral, cette règle ne dispense pas les parties du fardeau de la preuve et de leur obligation d’alléguer les faits et de présenter des moyens de preuve. La partie demanderesse doit exposer et prouver les faits qui fondent la recevabilité de la demande, la partie défenderesse les faits qui remettent en cause la recevabilité de la demande. Le tribunal doit toutefois procéder d’office à des investigations s’il existe un risque qu’un jugement au fond soit rendu malgré l’absence d’une condition de recevabilité (consid. 1.2.1).
Si une condition de recevabilité fait effectivement défaut, une décision d’irrecevabilité doit être prononcée. Si tel n’est pas le cas et qu’une décision sur le fond est rendue, celle-ci peut être entachée de vices graves et même être nulle dans certaines circonstances. S’agissant de l’intérêt digne de protection, une partie ne peut pas se limiter à soulever pour la première fois devant le Tribunal fédéral des circonstances qu’elle connaissait déjà dans la procédure cantonale et qui plaident contre l’existence d’un intérêt digne de protection (consid. 1.2.2).
La partie qui n’a plus d’intérêt actuel à l’annulation de la décision sur le fond peut tout de même recourir contre la décision sur les frais. Une telle démarche ne lui donne toutefois pas la possibilité d’obtenir indirectement, par le biais de la décision sur les frais, un réexamen de la décision sur le fond. Elle peut uniquement faire valoir que la décision sur les frais est contraire au droit pour un autre motif que le simple fait d’avoir succombé sur le fond (consid. 1.5).
S’agissant du refus de protection dans les cas clairs (art. 257 CPC), il suffit de présenter des objections crédibles. Elles n’ont pas besoin d’être rendues vraisemblables, étant précisé que les allégations sans fondement ne suffisent pas. Lorsque la partie défenderesse pourrait étayer ses objections (pour autant qu’elles soient vraies), et que la partie demanderesse – selon sa compréhension – n’est pas en mesure de donner des explications à leur sujet, il peut être exigé que les objections soient étayées (« substanziiert »). A défaut, la partie demanderesse serait de facto privée de la possibilité de réfuter immédiatement ces objections (consid. 1.7.2.3).
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