TF 4A_276/2011 du 11 octobre 2011
Loyer ; nullité de la notification du loyer initial ; facteurs de hausse invoqués de manière antinomique ; preuve d’une libéralité au moment de l’acquisition du bien immobilier niée ; art. 269 ; 269a ; 270 CO ; art. 19 OBLF
La formule officielle pour la conclusion de tout nouveau contrat de bail doit comporter les mêmes mentions qu'en cas de majoration du loyer. Le bailleur doit en particulier indiquer le loyer et l'état des charges payés par le précédent locataire, le nouveau loyer et le nouvel état des charges ainsi que les motifs précis d'une éventuelle hausse.
La législation sur les loyers abusifs utilise des critères de calcul fondés aussi bien sur les coûts que sur les prix du marché pratiqués pour des objets comparables. Ces deux sortes de critères ne procèdent pas de la même logique. Le bailleur qui fixe le loyer initial doit choisir sur quel terrain il entend se placer, c'est-à-dire décider s'il se fonde sur le critère des coûts ou sur celui des loyers usuels. S'il cumule des facteurs incompatibles, il s'expose au reproche d'avoir motivé sa prétention de manière insuffisamment claire, ce qui entraînera la nullité du loyer initial. Demeure réservée l'hypothèse où le bailleur propose une motivation principale et une subsidiaire.
En l’occurrence, les facteurs invoqués par le recourant sont antinomiques si bien que les autorités cantonales successives ont constaté à bon droit la nullité partielle du contrat de bail quant au loyer convenu.
On notera encore qu’en principe, le juge doit partir du critère absolu de fixation du loyer que constitue le rendement non abusif de la chose louée selon l'art. 269 CO. Il pourra ensuite confronter le montant obtenu aux loyers usuels du quartier. Il est exclu toutefois de fixer le loyer initial à la hauteur de la moyenne des loyers du quartier si celle-ci est plus élevée que le montant obtenu en application de l'art. 269 CO, car le loyer serait alors nécessairement abusif selon la règle générale de l'art. 269 CO.
Pour les immeubles anciens, il peut être difficile, voire impossible de reconstituer le capital propre investi, soit que les pièces comptables manquent, soit qu'elles laissent apparaître, après indexation, des montants économiquement irréalistes. Aussi la jurisprudence admet-elle, s'agissant d'immeubles construits ou acquis il y a quelques décennies, que la hiérarchie entre les critères absolus est inversée par rapport à celle prévalant pour les immeubles dits récents.
Le coût d'acquisition effectif de l'immeuble est en principe déterminant pour le calcul de rendement. La jurisprudence admet un correctif lorsque le bailleur a acquis le bien à titre gratuit ou à un prix préférentiel en raison d'une donation, respectivement d'une donation mixte. Lorsque la preuve d'une libéralité n'est cependant pas établie et que le prix payé est inférieur d'environ 10 à 20 % à la valeur du marché, il ne se justifie pas de s'écarter du prix effectif payé.