TF 4A_368/2017 du 19 février 2018
Résiliation; prolongation; bail commercial; motivation du congé comme indice d’une résiliation contraire à la bonne foi; pesée des intérêts pour accorder une prolongation de bail; art. 266a, 271a al. 1 lit. b, 272 CO
Le congé ordinaire ne suppose pas l’existence d’un motif particulier ; sa validité n’est limitée que par les règles de la bonne foi ; le fait que la résiliation ait des conséquences pénibles pour le locataire n’est pris en considération que dans l’appréciation de l’octroi d’une prolongation du bail ; la motivation du congé n’est pas une condition de sa validité, mais doit être fournie sur demande du locataire ; une motivation lacunaire ou fausse n’implique pas nécessairement que le congé est contraire aux règles de la bonne foi, mais peut constituer un indice de l’absence d’intérêt digne de protection à mettre fin au bail ; le caractère abusif du congé sera retenu notamment lorsque le motif invoqué n’est qu’un prétexte alors que le motif réel n’est pas constatable ; les motifs du congé peuvent encore être invoqués ou précisés – comme en l’espèce – durant la procédure de première instance (consid. 4) ; l’art. 271a al. 1 lit. b CO prohibe le congé-pression, soit le fait de placer le locataire face à l’alternative d’accepter une modification défavorable ou de quitter les locaux ; un lien de causalité entre la résiliation et la volonté du bailleur d’imposer sa prétention en modification du contrat doit exister ; il appartient au locataire de prouver ce lien ; en l’espèce, la locataire n’est pas parvenue à établir ce lien de causalité (consid. 5).
Dans l’appréciation de l’octroi et de la durée d’une prolongation de bail, le juge doit faire une pesée des intérêts en présence et tenir compte de différents critères mentionnés à l’art. 272 al. 2 CO, dont la liste n’est toutefois pas exhaustive ; le Code n’indique pas quel poids doit être accordé à chacun de ces critères ; le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation, que le Tribunal fédéral ne contrôle qu’avec retenue ; en l’occurrence, la cour cantonale a à bon droit tenu compte des intérêts d’une société tierce, qui était liée à la société bailleresse en tant que celle-ci avait été mise sur pied pour permettre la reprise de ses activités ; savoir si le juge peut de manière générale tenir compte des intérêts d’une société tierce liée au bailleur peut en revanche demeurer indécis (consid. 6).