TF 4A_409/2022 du 19 septembre 2023
Loyer; procédure; récusation; juge exerçant également comme avocat; hausse de loyer; autorisation de procéder; formule officielle; prestations supplémentaires du bailleur Art. 30 al. 1 Cst. ; 6 par. 1 CEDH ; 206 ss CPC ; 92 al. 2 LTF ; 62 ss, 269, 269a let. b, 269d al. 1 CO ; 14 OBLF
La garantie d’un tribunal indépendant et impartial résultant des art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH est violée lorsque, objectivement, il existe des circonstances susceptibles de créer une apparence de partialité ou un risque de préjugé (consid. 3.1). Un juge exerçant comme avocat à côté de son activité de magistrat apparaît comme partial lorsqu’il existe un mandat encore en cours avec une partie ou qu’il est intervenu à plusieurs reprises ou peu de temps auparavant en tant qu’avocat pour une partie (consid. 3.3). Une apparence de partialité peut également résulter de déclarations du juge avant ou pendant le procès, qui permettent de conclure que celui-ci a déjà formé son opinion sur la procédure. En revanche, le fait que – comme en l’espèce – un juge ait représenté à plusieurs reprises des bailleurs (non parties à la procédure) dans des affaires de droit du bail ne permet pas de retenir une partialité envers les parties locataires (consid. 3.4).
Dans une procédure en contestation d’une hausse de loyer, le locataire est requérant dans la procédure de conciliation, de sorte que, si le bailleur et requis fait défaut, l’autorité de conciliation procède comme s’il n’y avait pas eu d’accord (art. 206 al. 2 CPC). Ce n’est qu’après la délivrance de l’autorisation de procéder qu’un changement de rôle intervient (art. 209 al. 1 let. a CPC ; le bailleur devient demandeur) (consid. 4.3.1.1). La décision, notifiée séparément, par laquelle le tribunal constate que l’autorisation de procéder est valable, qu’il est compétent et qu’il peut entrer en matière est une décision incidente, qui peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral sur la base de l’art. 92 al. 1 LTF. Elle ne peut plus être attaquée ultérieurement (art. 92 al. 2 LTF).
L’art. 269d al. 1 CO oblige le bailleur à faire usage de la formule officielle pour notifier une hausse de loyer. Si la formule officielle fait défaut, la hausse est nulle. Le locataire qui a payé le loyer augmenté peut demander au bailleur la restitution du trop-perçu (art. 62 ss CO), en introduisant sa demande dans un délai relatif d’un an (note : ce délai a passé à 3 ans suite à la révision du droit de la prescription, [Modification du CO du 15 juin 2018, RO 2018 5343]) après avoir eu connaissance de son droit à la restitution et un délai absolu de 10 ans (consid. 6.1). Il convient toutefois de réserver l’abus de droit (consid. 6.3).
La notion de « prestations supplémentaires » au sens de l’art. 269a let. b CO est précisée par l’art. 14 OBLF, qui indique notamment que les frais causés par d’importantes réparations sont considérés, à raison de 50 à 70%, comme des investissements créant des plus-values. Le tribunal fait appel à son pouvoir d’appréciation pour déterminer la part des coûts entraînant une plus-value, de sorte que le Tribunal fédéral ne revoit cet élément qu’avec retenue (consid. 7.3.1).
L’art. 269 CO contient une règle générale indiquant quand les loyers sont abusifs ; l’art. 269a CO liste quant à lui des exceptions dans lesquelles les loyers sont présumés non abusifs. Avec les art. 269a let. b CO et 14 OBLF, le législateur a voulu encourager les prestations supplémentaires des bailleurs. En particulier, l’art. 14 OBLF a été introduit afin d’encourager les bailleurs à effectuer régulièrement des travaux d’entretien, mais aussi à regrouper les rénovations dans la mesure du possible (consid. 7.3.2).
Les faits sur lesquels reposent les normes de droit applicables doivent être allégués dans leurs grandes lignes. Si la partie adverse conteste les faits, elle doit le faire de manière suffisamment concrète, afin que les affirmations individuelles contestées puissent être identifiées (consid. 8.3).