TF 4A_495/2023 du 5 décembre 2023
Procédure; résiliation du bail et expulsion du locataire; calcul de la valeur litigieuse; intérêt digne de protection; appréciation des preuves; droit à une décision motivée; appréciation anticipée des preuves; art. 74 al. 1 let. a, 76 al. 1 let. b LTF; 152 et 257 al. 1 CPC; 29 al. 2 Cst.; 8 CC
Pour évaluer si la valeur litigieuse de CHF 15'000.- (art. 74 al. 1 let. a LTF) ouvrant le recours au Tribunal fédéral est atteinte en cas d’expulsion d’un locataire, les principes suivants s’appliquent : (i) si seule la question de l’expulsion est litigieuse, la valeur litigieuse correspond à l’équivalent de six mois de loyers ; (ii) si la validité de la résiliation est également litigieuse, la valeur litigieuse correspond à l’équivalent de trois ans de loyer (consid. 1.2).
En cas de résiliation du bail et d’expulsion du locataire, il n’existe plus d’intérêt digne de protection au recours (art. 76 al. 1 let. b LTF) lorsque le locataire a effectivement quitté les locaux (en raison de l’expulsion ou de par lui-même). En l’espèce, le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de savoir si le fait que certains objets appartenant au locataire se trouvent toujours dans l’objet loué est suffisant pour considérer que le locataire n’a pas quitté le bien (consid. 2.1).
L’appréciation des preuves est arbitraire lorsqu’elle est insoutenable. C’est le cas lorsque le tribunal a manifestement méconnu le sens et la portée d’un moyen de preuve, lorsque, sans motif, il n’a pas tenu compte d’un moyen de preuve important et décisif, ou lorsqu’il a tiré des conclusions insoutenables de l’état de fait établi. L’arbitraire suppose en outre que la décision soit arbitraire non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (consid. 3.2).
Le droit d’être entendu requiert de l’autorité qu’elle entende, examine et prenne en considération les arguments de la personne concernée par la décision. Il en résulte une obligation de motiver la décision. Pour ce faire, elle peut se limiter aux éléments décisifs. La motivation doit être rédigée de manière à ce que le justiciable comprenne la portée de la décision et puisse la soumettre en toute connaissance de cause devant l’instance supérieure (consid. 5.1).
La protection dans les cas clairs est accordée si : (a) l’état de fait n’est pas litigieux ou est susceptible d’être immédiatement prouvé et (b) la situation juridique est claire (art. 257 al. 1 CPC). C’est le cas si le tribunal parvient à la conclusion, sur la base des éléments du dossier, que la prétention de la partie requérante est admise et qu’un examen approfondi des objections de la partie requise ne peut rien y changer (consid. 6.1).
Le droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst., art. 8 CC, art. 152 CPC) octroie à toute personne à laquelle incombe le fardeau de la preuve la faculté de faire administrer les moyens de preuve adéquats, pour autant qu’ils aient été proposés régulièrement et en temps utile. Le droit à la preuve n’est pas mis en cause lorsque le tribunal procède à une appréciation anticipée des preuves et arrive à la conclusion que la mesure requise n’apporterait pas la preuve attendue ou ne modifierait pas sa conviction (consid. 7.1).