TF 4A_168/2024 du 21 janvier 2025
Bail commercial; transfert; procédure; transfert de bail commercial; responsabilité pour violation du contrat en raison du refus injustifié du transfert du bail; assistance judiciaire; chances de succès
L’action en transfert de bail est prévue à l’art. 263 CO, qui – à l’exception de son al. 4, 2e phrase – est une disposition absolument impérative. Le transfert de bail commercial est un accord tripartite : le locataire initial passe un contrat avec le locataire reprenant afin d’opérer un changement de locataire ; une fois que le bailleur a consenti au transfert, le locataire reprenant est subrogé aux droits du locataire initial et reprend l’ensemble des droits et obligations du locataire initial, c’est-à-dire prend sa place dans le contrat de bail (consid. 4.1).
Si les conditions légales sont réunies, l’art. 263 CO confère au locataire initial un droit subjectif à transférer son bail commercial au locataire reprenant. Le bailleur peut toutefois refuser de donner son consentement en présence de justes motifs (comme l’insolvabilité du locataire reprenant ou un accord sur un pas-de-porte) (consid. 4.2).
L’art. 263 CO limite la liberté contractuelle du bailleur, ce qui se justifie lorsque le locataire a un intérêt à imposer au bailleur un nouveau locataire déterminé (reprise du commerce avec plus-value, vente de stocks de marchandises), intérêt qui n’existe que pour les baux commerciaux. En contrepartie, le locataire initial répond solidairement avec le locataire reprenant pendant une certaine durée (consid. 4.3).
Le refus injustifié du transfert du contrat de bail par le bailleur constitue une violation du contrat au sens de l’art. 97 al. 1 CO (consid. 5.3). Dans ce contexte, la responsabilité du bailleur est subordonnée aux conditions suivantes : (1) une violation du contrat, consistant notamment dans le refus injustifié du bailleur au transfert du contrat de bail ; (2) un dommage ; (3) un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation du contrat et le dommage ; et (4) une faute (présumée). Le locataire supporte le fardeau de l’allégation et de la preuve des trois premières conditions, tandis que le bailleur doit apporter la preuve qu’il n’a pas commis de faute (consid. 5.2).
Pour obtenir l’assistance judiciaire, il faut notamment que la cause ne paraisse pas dépourvue de toute chance de succès (art. 117 let. b CPC). Cette condition fait défaut lorsque la perspective d’obtenir gain de cause est notablement plus faible que le risque de succomber et qu’elle ne peut donc être considérée comme sérieuse, de sorte qu’une personne raisonnable disposant des ressources financières nécessaires renoncerait à engager la procédure en raison des frais qu’elle s’exposerait à devoir supporter. En revanche, l’assistance judiciaire doit être accordée lorsque les chances de succès et les risques d’échec s’équilibrent à peu près, ou que les premières n’apparaissent que légèrement inférieures aux seconds. L’absence de chances de succès peut résulter des faits (faits allégués invraisemblables ou impossibles à prouver) ou du droit (démarche irrecevable ou position juridique infondée) (consid. 7.1.1). Le Tribunal fédéral ne revoit qu’avec retenue la décision du tribunal de deuxième instance refusant l’assistance judiciaire, celui-ci disposant d’un large pouvoir d’appréciation dans l’examen des chances de succès (consid. 7.1.2).