TF 4A_245/2024 du 24 juin 2025

Partie générale CO; interprétation du contrat; délai de résiliation; principe in dubio contra stipulatorem; art. 18 CO

En l’espèce, est litigieuse l’interprétation de la clause du contrat de bail relative à la résiliation (consid. 3).

Pour déterminer si un contrat a bien été conclu et pour l’interpréter, il convient d’abord de rechercher la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d’indices. Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si les volontés intimes divergent, le juge doit interpréter les déclarations et comportements des parties selon le principe de la confiance (interprétation objective). L’interprétation dite objective s’effectue non seulement d’après le texte et le contexte des déclarations, mais également sur le vu des circonstances qui les ont précédées et accompagnées, à l’exclusion des circonstances postérieures. Lorsque l’interprétation ainsi dégagée laisse subsister un doute sur leur sens, les clauses contractuelles doivent être interprétées en défaveur de leur auteur, conformément à la règle dite des clauses ambiguës (in dubio contra stipulatorem) (consid. 3.1).

La cour cantonale a considéré qu’aucun indice ne permettait de dégager une volonté réelle et concordante des parties lors de la conclusion du contrat, de sorte qu’elle a procédé à une interprétation objective. Le texte de la clause litigieuse se révélant peu clair, la cour cantonale a considéré nécessaire de s’en distancer et de déterminer ce que chacune des parties pouvait raisonnablement comprendre, d’après les règles de la bonne foi, des déclarations de volonté de l’autre. Compte tenu de la durée du bail (cinq ans), la cour cantonale est arrivée au constat que personne ne devait comprendre que, passé un an depuis le début du bail, la locataire aurait la possibilité de résilier le contrat en tout temps, moyennant un préavis de six mois, de sorte que la résiliation signifiée par la locataire était tardive et qu’elle était débitrice des loyers jusqu’au prochain terme contractuel pertinent, soit à l’échéance initiale de cinq ans (consid. 3.2).

Même si l’interprétation de la volonté objective des parties est une question de droit, le Tribunal fédéral fait preuve de retenue et n’intervient que si les juges cantonaux ont méconnu les règles d’interprétation ou si leur appréciation n’est pas compatible avec la compréhension du contrat par des parties raisonnables et de bonne foi. Selon la Haute Cour, la clause litigieuse pouvait être comprise de bonne foi de deux façons différentes, sans que le doute ne puisse être levé avec les autres moyens d’interprétation, d’ailleurs en l’espèce très limités. Dans ces conditions, la règle in dubio contra stipulatorem trouve application. Il convenait ainsi d’interpréter la clause contractuelle en défaveur de la bailleresse intimée, laquelle n’a pas rédigé le contrat de bail, mais est devenue propriétaire de l’immeuble. La clause doit partant être interprétée en ce sens qu’elle prévoit la possibilité de résilier le bail avant son échéance initiale de cinq ans, à condition qu’au moins une année se soit écoulée depuis le début du contrat et moyennant le respect d’un préavis de six mois.

Le recours est partant admis et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais (consid. 4).

Partie générale CO

Partie générale CO

Arrêt analysé

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