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Newsletter Bail - Rétrospective 2023
Toute l'équipe du Séminaire sur le droit du bail vous souhaite une belle et heureuse nouvelle année.
TF 4A_333/2022 du 9 novembre 2022
Résiliation; expulsion; procédure; résiliation suite au défaut de paiement du locataire; compensation; assistance judiciaire; preuve de l’indigence; art. 124 et 257d CO; 117 let. a, 119 al. 2, 257 CPC; 29 al. 3 Cst.
Rappel des conditions de la protection dans les cas clairs (art. 257 al. 1 CPC) (consid. 2).
Lorsque le locataire a du retard dans le paiement des loyers, le bailleur peut lui fixer un délai de paiement (qui doit être au moins de 30 jours pour les baux d’habitation et les locaux commerciaux) et l’avertir qu’à défaut, il résiliera le bail (art. 257d al. 1 CO). Si le locataire ne s’exécute pas dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le bail moyennant un délai de congé d’au moins 30 jours s’il s’agit d’un bail d’habitation ou d’un local commercial (art. 257d al. 2 CO). Une résiliation donnée avant l’échéance du délai de paiement est sans effet (consid. 3.1).
Selon la jurisprudence, en cas de délai fixé par le bailleur pour payer des loyers en retard, le locataire peut faire valoir la compensation. Pour ce faire, il doit adresser sa déclaration de compensation au bailleur (art. 124 CO) dans le délai de paiement fixé (consid. 3.1). Le locataire doit pouvoir prouver immédiatement les créances compensantes ; ainsi, invoquer des créances non chiffrées et non établies qui découleraient de défauts de l’objet loué n’est pas suffisant (consid. 5.2).
L’octroi de l’assistance judiciaire suppose notamment que la partie qui la requiert ne dispose pas de ressources suffisantes (art. 29 al. 3 Cst. ; art. 117 let. a CPC). En vertu de l’art. 119 al. 2 CPC, celle-ci doit justifier de sa situation de fortune et de ses revenus et exposer l’affaire et les moyens de preuve qu’elle entend invoquer. A cet égard, elle est soumise à une obligation de collaborer (consid. 11.2). Le seul fait de présenter un document qui atteste qu’elle bénéficie de l’aide sociale ne suffit pas toujours à prouver l’indigence ; le tribunal doit aussi examiner les circonstances d’espèces et les autres documents fournis (consid. 11.4.1). Dans le cas présent, l’instance précédente n’a donc pas violé le droit fédéral en refusant d’octroyer l’assistance judiciaire aux locataires qui avaient produit une attestation de l’aide sociale comme seule preuve de leur manque de ressources (consid. 11.4.3 et 11.5).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_333/2022
L’attestation de l’aide sociale comme (unique) preuve de l’indigenceTF 4A_521/2021 du 3 janvier 2023
Sous-location; résiliation; résiliation avec effet immédiat; hébergement de familiers; sous-location totale ou partielle; art. 253, 257f al. 3, 262 al. 1 et 2 CO
L’art. 257f al. 3 CO permet au bailleur de résilier le contrat de bail avec effet immédiat en cas de violation de son devoir de diligence par le locataire. Cette disposition s’applique également si le locataire fait un usage de la chose qui viole des stipulations du contrat. Pour déterminer l’usage convenu de chose louée, il convient de se référer au libellé du bail et de ses annexes et, si nécessaire, se rapporter aux règles régissant l’interprétation des contrats (consid. 3.2.1).
Selon le Tribunal fédéral, l’« l’hébergement de familiers » (conjoint, partenaire, concubin, enfants, amis, etc.) par le locataire est admis, pour autant que cela ne provoque pas une sur-occupation des locaux. Il ne s’agit ni d’une sous-location, ni d’un prêt à usage, faute de volonté contractuelle. L’hébergement de familiers concerne diverses situations, par exemple celles où (i) le locataire vit avec son conjoint, son partenaire ou son concubin et qu’ils se partagent le loyer, (ii) le locataire n’occupe plus lui-même l’appartement, mais le laisse à la disposition de son époux dont il vit séparé ou (iii) le locataire remet entièrement l’usage de la chose louée à son enfant envers lequel il a une obligation d’entretien en vertu des art. 276 al. 1 et 277 al. 2 CC (consid. 3.2.3).
Lorsqu’un locataire héberge son enfant adulte et qu’il n’y a plus de devoir légal d’entretien, il faut déterminer – en fonction des circonstances – si la volonté de conclure un contrat existe. Dans le cas d’espèce, le Tribunal fédéral retient qu’il y a bien une volonté de conclure un contrat de bail, et donc une sous-location, entre le locataire et sa fille : celle-ci s’est installée chez son père avec son mari et ses deux enfants, a convenu avec son père de la répartition des chambres et a accepté de prendre en charge les deux tiers du loyer. De ce fait, un contrat visant à occuper une partie du logement à titre onéreux a nécessairement été passé (consid. 3.4).
Si le locataire a sous-loué la chose sans demander l’autorisation du bailleur et que l’un des motifs de l’art. 262 al. 2 CO pour s’opposer à la sous-location (motifs auxquels s’ajoute l’interdiction de l’abus de droit) est donné, la condition du caractère insupportable du maintien du contrat pour le bailleur de l’art. 257f al. 3 CO est automatiquement réalisée (consid. 4.2). Si la sous-location est totale (c’est-à-dire qu’elle porte sur l’entier de la chose louée), il y a abus de droit si le locataire a perdu toute idée de reprendre dans un avenir prévisible l’usage de la chose louée et qu’il a procédé en réalité à une substitution de locataires, ce qui est un but étranger à l’institution même de la sous-location (consid. 4.2.1). Ce raisonnement ne s’applique pas en cas de sous-location partielle, car le locataire réside toujours dans le bien (consid. 4.2.2).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_521/2021
Accueil de l’enfant du locataire en dehors de toute obligation légale d’entretien : hébergement, prêt à usage ou sous-location ?TF 4A_470/2022 du 4 janvier 2023
Procédure; expulsion par la voie du cas clair en procédure sommaire; appel; vrais nova; art. 257, 317 al. 1 CPC
Une décision rendue en procédure sommaire selon l’art. 257 CPC peut faire l’objet d’un appel (art. 308 ss CPC) lorsque la valeur litigieuse est de CHF 10’000.- ou plus. Dans la procédure d’appel, les faits et moyens de preuves nouveaux ne sont recevables qu’aux conditions de l’art. 317 al. 1 CPC. S’agissant des vrais nova, le requérant (c’est-à-dire, en cas d’expulsion par la voie du cas clair, le bailleur) dont la requête a été déclarée irrecevable ne peut pas produire en appel des pièces nouvelles, même s’il ne lui était pas possible de les produire devant le premier juge. Il conserve toutefois la possibilité d’introduire une nouvelle fois sa requête en cas clair devant le premier juge. Ce principe ne concerne pas la partie requise (c’est-à-dire le locataire), qui peut invoquer des vrais nova aux conditions de l’art. 317 al. 1 CPC (consid. 4.1).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_470/2022
François Bohnet
Avocat spécialiste FSA droit du bail, LL.M., Dr en droit, Professeur à l'Université de Neuchâtel
TF 4A_462/2022 du 6 mars 2023
Procédure; assistance judiciaire; motivation du recours; libellé des conclusions; chances de succès; art. 117, 311 ss CPC
Selon l’art. 117 CPC, une personne a droit à l'assistance judiciaire si elle ne dispose pas de ressources suffisantes (let. a) et si sa cause ne paraît pas dépourvue de toute chance de succès (let. b). Il s'agit de conditions cumulatives (consid. 4). Le recours (au sens des art. 319 ss CPC) doit contenir une motivation (art. 321 al.1 CPC) ; celle-ci doit satisfaire aux exigences posées pour un appel selon l’art. 311 al. 1 CPC. Cela signifie qu’il est nécessaire de démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée par une motivation suffisamment explicite, en désignant précisément les passages de la décision qui sont attaqués et les pièces sur lesquelles repose la critique. A défaut, le recours est irrecevable (consid. 5.1.1). Dans le cas d’espèce, le tribunal de première instance a refusé l’assistance judiciaire aux défendeurs et recourants au motif que leur cause était dépourvue de chances de succès ; il a renoncé à examiner la condition de l’indigence. Le Tribunal fédéral retient que, dans ces circonstances, les recourants pouvaient se limiter à motiver le recours sur la question des chances de succès et n’avaient pas à fournir de motivation au sujet de l’indigence (consid. 5.2). Le recours doit comporter des conclusions, qui doivent en principe être libellées de telle manière que l’autorité supérieure puisse, s’il y a lieu, les incorporer sans modification au dispositif de sa propre décision. Si l’acte ne satisfait pas à ces conditions, l’autorité doit toutefois entrer en matière si ce qui est demandé ressort clairement de la motivation mise en relation avec la décision attaquée (consid. 6.1). Un procès est dépourvu de chances de succès (cf. art. 117 let. b CPC) lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu’un plaideur raisonnable et aisé renoncerait à s’y engager en raison des frais qu’il serait exposé à devoir supporter. L’absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. Le juge cantonal dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’examen des chances de succès, de sorte que le Tribunal fédéral ne revoit sa décision qu’avec retenue (consid. 9.1). |
Commentaire de l'arrêt TF 4A_462/2022
Le recours à l’encontre d’une décision de rejet d’assistance judiciaire n’examinant pas toutes les conditions à son octroiTF 4A_429/2022 du 7 mars 2023
Résiliation pour non-paiement des loyers; avis comminatoire; interprétation selon le principe de la bonne foi; art. 257d CO
L’art. 257d CO permet au bailleur de résilier le bail lorsque le locataire a du retard dans le paiement du loyer ou des frais accessoires ; cela suppose un avis comminatoire de la part du bailleur qui, vu la rigueur de la sanction prévue par la disposition précitée, doit être suffisamment clair et précis. Cet avis doit notamment indiquer le montant de l’arriéré à payer de façon déterminée ou déterminable (par exemple en désignant précisément les mois de loyers à payer) (consid. 3.1).
L’indication d’un loyer trop élevé n’entraîne pas nécessairement l’inefficacité de l’avis comminatoire ; en effet, le locataire qui constate une erreur doit la signaler au bailleur, à défaut de quoi il ne mérite pas d’être protégé. Cette règle découle des principes généraux en matière d’interprétation des manifestations de volonté : dans un premier temps, le tribunal doit déterminer la volonté subjective des parties ; s’il n’y parvient pas, il doit déterminer leur volonté objective en appliquant le principe de la confiance. Ce n’est qu’une fois la manifestation de volonté interprétée qu’il peut être examiné si la résiliation doit être annulée parce que l’avis comminatoire contrevient aux règles de la bonne foi (consid. 3.1).
En vertu de leur liberté contractuelle, les parties peuvent, une fois l’avis comminatoire reçu par le locataire, décider d’en modifier les conditions, en prévoyant notamment d’autres modalités de paiement (consid. 4.1). Il convient toutefois de préciser que, si de nouveaux loyers arrivent à échéance et ne sont pas payés, un nouvel avis comminatoire est nécessaire (consid. 4.2.2).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_429/2022
Demeure de la partie locataire dans le paiement du loyer et contenu de l’avis comminatoireTF 1C_759/2021 - ATF 149 I 25 du 19 décembre 2022
Rénovations; recours au Tribunal fédéral contre un acte normatif cantonal; primauté du droit fédéral ; art. 49, 109 et 122 Cst.
La disposition adoptée dans le canton de Bâle-Ville visant à octroyer au bailleur l’autorisation de transformer, rénover ou assainir un immeuble uniquement si un droit de retour des locataires dans l’objet loué est prévu viole le principe de la primauté du droit fédéral (art. 49 Cst. en lien avec les art. 109 et 122 Cst.). Cette disposition, qui protège avant tout les intérêts privés des locataires (consid. 4.4.5), interfère directement dans les contrats de bail (consid. 4.4.6). Vu que cette matière est réglée exhaustivement par le droit fédéral et qu’aucune compétence législative n’est laissée aux cantons (consid. 4.4.6), la disposition en question doit être annulée (consid. 6).
Commentaire de l'arrêt TF 1C_759/2021 - ATF 149 I 25
Le Tribunal fédéral continue de façonner les contours des dispositions cantonales en matière de logement et d’en poser les limites face au droit fédéral sur le bail à loyerTF 4A_12/2023 du 31 mars 2023
Résiliation; expulsion; procédure; protection dans les cas clairs; abus de droit; notification de plusieurs congés; assistance judiciaire; chances de succès; art. 257d CO; 257 CPC; 64 LTF; 2 al. 2 CC
Le tribunal admet la protection dans les cas clair au sens de l’art. 257 CPC lorsque l’état de fait n’est pas litigieux ou est susceptible d’être immédiatement prouvé (let. a) et que la situation juridique est claire (let. b). S’agissant de la deuxième condition, le Tribunal fédéral rappelle qu’elle n’est généralement pas remplie lorsque l’application d’une norme requiert que le tribunal fasse usage de son pouvoir d’appréciation ou prenne une décision en équité, par exemple lorsqu’il doit apprécier la bonne foi d’une partie. Toutefois, l’invocation de l’abus de droit ne signifie pas nécessairement que le cas clair doit être écarté ; en particulier, le cas clair peut être admis si le comportement d’une partie correspond à l’une des situations que la doctrine qualifie d’abus de droit manifeste (consid. 3.2).
Un comportement totalement contradictoire – même s’il ne vise pas à décevoir des attentes légitimes – peut être considéré comme un abus de droit (consid. 7.4).
Après avoir résilié le bail de manière ordinaire, un bailleur peut notifier une résiliation extraordinaire pour une date de résiliation antérieure à la date de résiliation ordinaire. Il peut également, à titre subsidiaire, notifier un second congé ordinaire en cas d’inefficacité d’un congé extraordinaire, de même que répéter un congé nul ou inefficace pour des raisons formelles (par exemple un vice de forme) (consid. 7.1). Le Tribunal fédéral considère ainsi en l’espèce que rien ne s’oppose à ce que le bailleur, après avoir notifié un congé ordinaire et un congé extraordinaire contestés par le locataire, notifie une résiliation extraordinaire pour arriérés de paiement alors que la procédure relative aux deux premières résiliations est pendante ; il ne s’agit pas d’une résiliation conditionnelle (consid. 7.2).
L’une des conditions de l’assistance judiciaire est que la cause ne soit pas dépourvue de chances de succès (art. 64 al. 1 LTF). En cas de recours, cette condition est en principe remplie lorsque la partie qui demande l’assistance judiciaire est intimée et qu’elle avait obtenu gain de cause devant l’instance précédente. Il convient toutefois de s’écarter de ce principe lorsque la décision attaquée est entachée d’un vice manifeste ; dans ce cas, on peut attendre de la partie intimée qu’elle se soumette au recours (consid. 8.2).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_12/2023
Pluralité de résiliations et protection dans les cas clairs en matière d’évacuationTF 4A_153/2023 du 3 juillet 2023
Conclusion; frais accessoires; modification du contrat; interprétation du contrat; caractère consensuel ou unilatéral de la modification; art. 18, 269d al. 3 CO
Lorsqu’un contrat doit être interprété, il faut en premier lieu tenter d’établir la volonté réelle et concordante des parties (art. 18 al. 1 CO). Si cette volonté ne peut pas être établie, il convient d’interpréter les déclarations des parties en vertu du principe de la confiance, et ainsi déterminer comment elles pouvaient et devaient se comprendre vu le contexte et l’ensemble des circonstances (interprétation objective) (consid. 4).
L’art. 269d al. 3 CO – qui pose les conditions permettant au bailleur d’apporter des modifications unilatérales au contrat de bail (autres que la majoration du loyer) au détriment du locataire – ne s’applique pas aux modifications du contrat consensuelles. Pour que la protection de l’art. 269d al. 3 ne soit pas contournée, il faut toutefois que le locataire ait été suffisamment informé de ses droits et qu’il n’ait pas donné son accord sous la menace d’une résiliation (consid. 5.6).
Une nouvelle modification du contrat de bail valable en la forme et non contestée ne remédie pas un vice de forme d’une modification antérieure nulle ; un droit de restitution existe donc jusqu’à la nouvelle modification valable (consid. 5.7.2).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_153/2023
Marie-Laure Percassi
Docteure en droit, collaboratrice scientifique à l'Université de Neuchâtel et avocate
TF 4A_195/2023 du 24 juillet 2023
Loyer; résiliation; expulsion; procédure; résiliation pour défaut de paiement; protection dans les cas clairs; formule officielle lors de la conclusion du bail; abus de droit; art. 257d CO; 257 CPC
La réglementation de droit matériel mise en place par le législateur à l’art. 257d CO signifie que le locataire mis en demeure doit évacuer l’objet loué dans les plus brefs délais s’il ne paie pas le loyer en retard (consid. 3.1).
Rappel des conditions permettant l’application de la procédure sommaire de protection dans les cas clairs (consid. 3.2.1).
L’introduction, par un locataire, d’une procédure en contestation du loyer initial et/ou d’une procédure en contestation du congé ne fait pas obstacle à l’action postérieure en expulsion intentée par le bailleur selon l’art. 257 CPC (consid. 4.1).
Le locataire excipe abusivement du défaut de remise de la formule officielle relative au loyer initial s’il omet de protester dans un délai raisonnable. Dans un tel cas, l’on peut en effet inférer qu’il considère le loyer comme non abusif et renonce à le contester devant l’autorité, validant ainsi le montant convenu et guérissant les effets du vice de forme (consid. 4.4).
En l’espèce, la bailleresse a ouvert action en expulsion des locataires par la voie du cas clair suite à une résiliation du contrat de bail pour défaut de paiement. Dans ce cadre, les locataires ont invoqué que le loyer initialement fixé était nul faute de formule officielle valable, que le loyer réellement dû avait été intégralement payé et que la résiliation n’était par conséquent pas valable. À cet égard, le Tribunal fédéral confirme le raisonnement de la deuxième instance : celle-ci a considéré que les locataires ont commis un abus de droit en se prévalant de la nullité de la formule officielle uniquement au moment où la bailleresse a indiqué son intention de résilier le bail pour défaut de paiement, alors qu’ils connaissaient déjà le vice de forme affectant le contrat depuis des mois.
Commentaire de l'arrêt TF 4A_195/2023
Admission de l’expulsion par la voie du cas clair et abus de droit manifeste des locatairesTF 4A_271/2022 du 15 août 2023
Loyer; modification du loyer en cours de bail; loyer précédemment indexé; méthodes de calcul relative et absolue; statistiques officielles; logements de comparaison; art. 269a CO; 11 OBLF
En principe, seule la méthode relative est applicable pour déterminer si une adaptation du loyer en cours de bail est admissible, et non la méthode absolue. Question laissée ouverte en l’espèce quant à savoir si les bailleurs pouvaient se prévaloir de la méthode absolue pour augmenter le loyer de l’intimé pour un terme postérieur à l’échéance du bail indexé (consid. 4).
Le critère des loyers usuels peut être examiné sur la base des loyers de logements comparables à la chose louée ou sur la base de statistiques officielles (art. 11 OBLF) (consid. 5.1).
S’agissant des statistiques officielles, elles doivent contenir des données chiffrées et suffisamment différenciées, ainsi que tenir compte de l’évolution récente des loyers (consid. 5.1.1). Il existe bien des statistiques à Genève, mais celles-ci ne répondent pas aux exigences de l’art. 11 al. 4 OBLF. Le Tribunal fédéral souligne qu’il est totalement exclu de tenir compte de telles statistiques en cas d’augmentation du loyer en cours de bail (contrairement à ce qui vaut en matière de contestation du loyer initial selon l’ATF 148 III 209) (consid. 5.2.3).
S’agissant des logements de comparaison, ceux-ci doivent présenter les mêmes caractéristiques que le logement litigieux quant à l’emplacement, la dimension, l’équipement, l’état et l’année de construction. En outre, il doit être tenu compte de l’évolution récente de leurs loyers au regard du taux hypothécaire et de l’indice suisse des prix à la consommation (art. 11 al. 1 OBLF) (consid. 5.1.2). Le Tribunal fédéral précise comment les critères de l’année de construction et de la dimension (nombre de pièces et surface) doivent être interprétés. Il relève également que, en tant que tel, l’étage n’est pas un critère retenu par la loi ou la jurisprudence ; toutefois, il s’agit d’une caractéristique pertinente dans le cas présent, car le logement se situe « au sous-sol » (c’est-à-dire que la partie inférieure des fenêtres se situe au niveau du trottoir), de sorte qu’il ne saurait être comparable à un appartement situé à un étage élevé (consid. 5.2.2).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_271/2022
Adaptation du loyer en cours de bail fondée sur les loyers du quartierTF 4A_263/2023 - ATF 149 III 469 du 11 septembre 2023
Procédure; notion de « protection contre les congé »; art. 6, 243 al. 2 let. c et al. 3 CPC
Le régime de la procédure applicable a la priorité sur la compétence matérielle du tribunal de commerce. Vu l’art. 243 al. 3 CPC, celui-ci n’est donc pas compétent pour connaître des litiges relevant de la procédure simplifiée selon l’art. 243 al. 2 let. c CPC (rappel de l’ATF 139 III 457) (consid. 2.1).
Les actions concernant des prétentions financières formulées après la fin du bail et en dehors de toute procédure relative à la consignation des loyers et des fermages, à la protection contre les loyers et les fermages abusifs, à la contestation de la résiliation ou à la prolongation du bail ou du contrat de bail ne sont pas soumises à la procédure simplifiée en vertu de l’art. 243 al. 2 let. c CPC. Cela vaut même s’il est nécessaire de déterminer, dans la procédure, quand et comment le contrat de bail a pris fin (consid. 2.6).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_263/2023 - ATF 149 III 469
François Bohnet
Avocat spécialiste FSA droit du bail, LL.M., Dr en droit, Professeur à l'Université de Neuchâtel
TF 4A_337/2022 - ATF 150 III 103 du 24 octobre 2023
Procédure; divers; qualification d’une construction (mobilière ou immobilière); notion de «protection contre les congés» au sens de l’art. 243 al. 2 let. c CPC; demande reconventionnelle; art. 642, 667 al. 1, 677 CC; 224 al. 1 et 243 al. 2 let. c CPC
Selon l’art. 677 al. 1 CC, les constructions légères, telles que chalets, boutiques, baraques, élevées sur le fonds d’autrui sans intention de les y établir à demeure, appartiennent aux propriétaires de ces choses. Ces constructions sont mobilières et ne sont pas soumises au principe de l’accession (art. 667 CC), ce qui signifie qu’elles demeurent la propriété de ceux qui les ont établies. En revanche, les constructions unies durablement au fonds appartiennent au propriétaire de ce fonds (consid. 5.1).
Pour qu’une construction puisse être qualifiée de mobilière au sens de l’art. 677 CC, elle doit présenter un élément subjectif, qui est l’intention des parties d’établir une relation temporaire entre la chose et le fonds, et un élément objectif, qui consiste en un lien externe entre la chose et le fonds, qui doit être, dans une certaine mesure, reconnaissable extérieurement. Si une construction entre dans les catégories de l’art. 677 CC, l’intention des parties est très importante. Ce n’est que si la construction a été dès le début unie au sol de manière si intense que, selon l’usage local, elle en constitue un élément essentiel, c’est-à-dire qu’elle en est une partie intégrante, que l’intention des parties n’est pas décisive (consid. 5.2).
La notion de « protection contre les congés » au sens de l’art. 243 al. 2 let. c CPC doit être comprise dans une acception large, dans la mesure où cette règle a pour but de protéger le locataire. Ainsi, un litige relève de cette notion dès que le tribunal doit se prononcer sur la fin du bail, que ce soit par exemple en raison d’un congé ordinaire ou extraordinaire ou en raison de l’inexistence d’un rapport contractuel ou de l’expiration d’un contrat de bail de durée déterminée (consid. 8.3.1).
L’art. 224 al. 1 CPC permet au défendeur de déposer une demande reconventionnelle uniquement si la prétention qu’il invoque est soumise à la même procédure que la demande principale. Ainsi, lorsque le locataire introduit une action en contestation de la résiliation portant sur un bail d’habitation, le bailleur peut prendre dans la même procédure des conclusions reconventionnelles en expulsion des locataires, car les deux procédures sont soumises à la procédure simplifiée en vertu de l’art. 243 al. 2 let. c CPC. Il faut toutefois réserver le cas spécial de l’action en expulsion intentée par le bailleur selon la procédure de protection dans les cas clairs de l’art. 257 CPC, laquelle est soumise à la procédure sommaire (consid. 8.3.1 et 8.3.2).
Commentaire de l'arrêt TF 4A_337/2022 - ATF 150 III 103
La distinction entre baux d’habitations et de terrains nus, et la procédure applicable en cas de conclusions reconventionnelles en remise en étatListe
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